Vincent est séminariste en quatrième année pour le diocèse de Laval. Il a fait des brillantes études en humanités et littérature à Rennes II. Fin critique, il nous présente un tableau qui éclaire la situation que nous vivons actuellement.
Nous sommes bientôt en mai, les beaux jours arrivent et pourtant notre cœur semble frigorifié. La petite procession se déplace en rangs serrés vers l’abbaye en ruine. Le dégradé de couleur du ciel allant jusqu’au noir au niveau du sol plonge le monde dans l’obscurité. La vie et la joie ont disparu du monde des hommes.
L’Église ne vit plus physiquement ses rassemblements hebdomadaires, le manteau de neige semble épais sur la vie fraternelle des chrétiens. Mêmes nos morts sont presque laissés sans sépultures. Les tombes sont désespérément seules. Mais tout n’est pas perdu, la blancheur de la couche de neige fait ressortir la ruine centrale et y met en évidence un point de lumière : au centre de la composition, dans la perspective de la petite arche, sous la voûte qui se dresse encore, un prêtre célèbre la Sainte Messe. Le bâtiment est en ruine, tout est mort aux alentours, le messe est toujours célébrée.
Dans les abbayes, dans les presbytères, dans les séminaires, le culte divin persiste. Le monde s’est arrêté de vivre, mais les hommes offrent toujours le Saint Sacrifice. Invisible à nos yeux de confinés, presque invisible sur le tableau, la messe apporte au monde toutes les grâces nécessaires à persévérer dans la confiance. La fonte de la neige approche, le déconfinement aussi.
Le Christ a vaincu la mort, bien que notre vie se rapproche de l’aspect général du tableau, il ne faut pas oublier qu’en son centre se situe le Christ qui se donne au monde sur l’autel. Malgré les ruines et la mort, puisque avec l’épidémie il s’agit bien de cela, n’oublions pas la perspective de notre salut et de celui du monde entier : « Les serviteurs de Dieu verront sa face, et son nom sera sur leur front. La nuit aura disparu, ils n’auront plus besoin de la lumière d’une lampe ni de la lumière du soleil, parce que le Seigneur Dieu les illuminera ; ils régneront pour les siècles des siècles. » (Ap 22, 4-5) Plus de froid, plus de noirceur, plus de ruine : le Seigneur vient !
Vincent de ROCHAMBEAU